Publié le 10/06/2025 par
Editorial de Maryse Fiorenza-Gasq, directrice de l’Espace de réflexion éthique ERENA – Site de Limoges, coordinatrice du Centre de diagnostic prénatal du Limousin
Tout être humain désire, c’est même le propre de l’homme ! L’intimité, la sexualité, la vie affective, la vie familiale sont des piliers fondamentaux de la santé physique et mentale. Elles constituent des éléments essentiels de la relation à soi-même et aux autres, et participent pleinement à l’épanouissement de chacun. Notre société, engagée dans une démarche d’inclusion, vise à réduire les écarts et à favoriser l’intégration des personnes en situation de handicap. La loi de février 2005, « Égalité des droits et des chances, et promotion de la citoyenneté des personnes handicapées », a posé les bases en introduisant la notion de compensation et d’accessibilité comme fondements du respect des droits individuels. Cependant, elle n’aborde pas la question de l’accès à la parentalité en situation de handicap. Il est alors légitime de s’interroger : la capabilité, la capacité à être parent « handicapé », est-elle une demande universalisable ou concerne-t-elle spécifiquement les personnes en situation de handicap ? Que signifient ces termes ? Si la capabilité renvoie aux droits fondamentaux, à la possibilité d’accéder à une vie familiale épanouissante, la capacité, quant à elle, concerne l’aptitude à assumer la responsabilité de cette parentalité, à s’impliquer dans cette nouvelle étape de vie, en tant que sujet de droit, avec une identité sociale de parent. Ces deux notions sont essentielles pour tous les parents, mais la capacité, au sens de responsabilité, semble être première dans l’élaboration d’un projet parental. Devenir parent n’est pas seulement un désir, c’est un projet de vie, une étape majeure qui bouleverse l’existence. Pour beaucoup, cette étape s’inscrit dans un parcours naturel, mais pour les personnes en situation de handicap, elle peut soulever des questions spécifiques : celles du corps biologique, du psychisme, des compétences intellectuelles parfois, ou encore du risque de transmission de maladies héréditaires. Ces interrogations, souvent émises par les personnes elles-mêmes, témoignent d’un haut niveau de responsabilité et d’un souci profond pour leur futur enfant. Devenir parent, c’est un changement de taille, pour tous ! C’est une transformation profonde, qui demande des ajustements dans tous les aspects de la vie : priorités, rythmes, responsabilités. Si ces défis peuvent être amplifiés pour les parents en situation de handicap, leur essence reste la même pour tous les parents. Il est important de ne pas sous-estimer ces difficultés et d’accompagner chaque parcours de parentalité de manière adaptée, dès le projet de grossesse, avec des consultations pré-conceptionnelles. En effet, les parcours de parentalité varient selon le type de handicap, et il est important de prendre en compte l’impact de celui-ci sur le parent, mais aussi sur l’enfant. La création de structures, de consultations spécialisées, les associations ou les dispositifs de pair-aidance, constituent une avancée majeure pour répondre aux besoins spécifiques de ces familles. De façon concomitante, la formation et la supervision des professionnels de santé et du secteur social doivent se renforcer pour mieux accompagner ces parents dans leur projet. Cela nécessitera des investissements importants dans les politiques de santé publique, afin de garantir un accompagnement de qualité, respectueux et adapté. Le 20 mai dernier, à Toulouse, s’est tenue une après-midi d’informations et d’échanges organisée par l’ERE Occitanie avec des professionnels du secteur sanitaire, médico-social, des membres d’associations, des personnes en situation de handicap, des aidants, portant sur un sujet essentiel : la parentalité des personnes en situation de handicap. Cet événement a permis d’aborder cette thématique sous un regard à la fois éthique, juridique et social.
Les échanges entre le public et les différents intervenants ont montré que la société doit évoluer vers une inclusion plus forte, en soutenant l’autonomie des personnes en situation de handicap, en valorisant leur capacité à devenir parent et en les accompagnant, mais également en faisant confiance à leur capacité, leur responsabilité à ne pas l’être quand le parcours parental parait trop aléatoire. C’est ainsi que nous construirons une société plus juste, plus respectueuse pour chacun.